Un fragment des archives épiscopales échappé aux flammes...
Le terrible incendie du 24 mai 1788 a dévasté la ville de Sion et fait disparaître irrémédiablement quasiment tous les plus anciens documents des archives de l’évêché de Sion. Il est donc très difficile d’entreprendre des recherches sur les droits et les possessions des évêques de Sion durant le Moyen Âge. Autant dire que ce feuillet de parchemin, daté de la première moitié du XIIIe siècle, sans doute vers 1225, peut s’avérer une précieuse et rare source d’informations.
Ce fragment contenant une liste des droits et revenus de l’évêque de Sion a été, par chance, conservé dans la reliure d’un cahier de comptes appartenant à Nicolas Wolff, bourgeois qui exerça la fonction de châtelain de Sion de 1584 à 1586. Il faisait sans doute partie d’un livre de plusieurs feuillets de parchemin, d’une dimension indéterminée, qui renfermait une liste de tous les droits et revenus de la mense épiscopale à l’intérieur et à l’extérieur des limites du diocèse. Un autre fragment de ce même cahier a été également conservé dans les archives du Chapitre.
Ce feuillet contient une liste des droits et revenus de l’évêque de Sion à Montreux et dans ses environs. A l’est de Montreux « tout ce qui s’étend de la cluse de Chillon jusqu’à l’Eau Froide » (cette Eau Froide est une rivière entre Villeneuve et Rennaz) est un fief sédunois tenu par le comte de Savoie, en particulier le château de Chillon. L’église de Montreux dépend alors de l’évêque de Sion. Ces biens situés pour la plupart aux alentours de Montreux et Oron – Blonay (Blunaium) et Tercier (Estercie), actuellement un hameau de la commune de Blonay, Brent, hameau de la commune de Montreux, Tavel, également un quartier de Montreux, Chailly-sur-Clarens (Charlie) – revêtent une importance matérielle non négligeable. Leur vente a été provoquée par des pressions politiques extérieures, mais aussi par leur éloignement géographique peu favorable pour conserver à long terme la mainmise sur ces possessions. L’Église de Lausanne et la Savoie ont tout naturellement saisi l’occasion et racheté ces terres, entre 1244 et 1295.
Enfin, ce fragment de parchemin partiellement effacé nous renseigne aussi sur les origines des diocèses de la Suisse romande. L’espace occupé dès le VIe siècle par le diocèse de Lausanne était auparavant partagé entre ceux de Sion et de Genève, créés, quant à eux, dès la seconde moitié du IVe siècle. Il apparaît que le diocèse de Sion dépassait initialement les frontières que nous lui connaissons aujourd’hui, s’étendait plus loin que l’Eau-Froide, en direction de Lausanne, assurément jusqu’à Saint-Saphorin. Cela nous entraîne bien loin, peut-être trop!
Anne Andenmatten, archiviste de la Bourgeoisie de Sion